J’ai été chroniqueur en histoire et en généalogie de mars 2001 à décembre 2005. Les articles qui suivent ont été publiés dans le bulletin Îles Jésus de la Société d’histoire et de généalogie de l’île Jésus, de Laval, ainsi que dans le journal Le Bavard au gouvernement fédéral. Ils ont également été mis en ligne sur le site web de plusieurs organismes, dont ceux précités.
À LA RECHERCHE DE SES ANCÊTRES
par Mario Scott
MADONNA, ROOSEVELT ET MON FILS
Madonna est ma 9e petite cousine, Franklin Delano Roosevelt, mon 10e petit cousin du 2e degré, et mon fils est mon 8e petit cousin!
Je sais, je sais. Vous vous demandez : d’où sort-il pour écrire pareille chose? Mais qu’est-ce c’est que cette histoire là? Pourtant ce que vous lisez là est bel et bien la vérité. Etre parent avec Madonna ou bien avec le 32ième président américain, ou encore avec Patrick Swayze (oui, oui, mesdames, avec lui aussi), ce sont là des sujets de conversation originaux pour alimenter les discussions de salon. Mais rassurez-vous, loin de moi l’idée d’être pédant et dites-vous bien que mes liens avec ces gens ne payent pas mon hypothèque. C’est assez inusité, j’en conviens, mais vous êtes probablement tous aussi parents que moi avec eux. Mais voilà, seule la généalogie peut vous le confirmer. Quant au lien avec mon propre fils, avouez que c’est assez particulier. Mais ça s’explique facilement.
LES ANCÊTRES COMMUNS
Pour les néophytes en matière de généalogie, il peut sembler étrange de lire qu’il y a, au sein de leur propre famille, des liens familiaux par des ancêtres communs. Par exemple, mon fils est beaucoup plus que cela avec moi. Outre le fait d’être mon rejeton, il a, en tout, 26, je dis bien 26 liens de parenté avec moi, par les lignées de sa mère, mon épouse, entrecroisées avec les miennes. En voici quelques-uns que me donne mon logiciel informatique : 6e cousin du 2e degré, 7e cousin du premier degré, 8e cousin, demi 8e cousin du premier degré, 8e cousin du premier degré, 8e cousin et ainsi de suite, 26 fois. C’est encore plus incroyable ses liens avec sa mère, car il en a pas moins de 32 avec elle.
Mais comment cela se peut-il? C’est très simple. Il suffit de consulter le tableau suivant.
DÉMOGRAPHIE EN NOUVELLE-FRANCE
Année Population
1627 55 (dont 18 à Québec)
1635 199
1641 300 (Nouvelle-Angleterre : 50000)
1663 2500
En 1681, la seigneurie de l’île Jésus, qui allait devenir Laval, ne compte que 27 habitants. Ils ne représentent que quatre familles : les Charbonneau, les Label(le), les Ethier et les Buisson. Elles habitent toutes à Saint-François, à la pointe située à l’est de l’île, à l’embouchure des rivières des Prairies et St-Jean (aujourd’hui des Mille-Iles). Le premier d’ailleurs à y établir sa famille est Guillaume Labelle, gendre de mon 8ième arrière-grand-père, Olivier Charbonneau.
Alors avec un si petit nombre de colons, en Nouvelle-France, il est facile de comprendre que la plupart des Québécois, qui ont un père et/ou une mère ayant un patronyme français, soient parents. Voici un autre tableau intéressant pour illustrer ce fait génétique.
LES DESCENDANTS DES IMMIGRANTS
Ancêtre Nombre de descendants mariés avant 1800
Jean Guyon (Dion) 9674
Marin Boucher 8502
Jacques Archambault 8445
Noël Langlois 7847
Abraham Martin 7765
Pierre Miville (dit Le Suisse) 6552
Pierre Desportes 6715
Jean Roussin 4730
Louis Hébert 4592
Nicolas Pelletier 3935
En comparant ce tableau avec mes données généalogiques, j’ai constaté que tous ces immigrants, venus en Nouvelle-France entre 1617 et 1649, sont mes arrières-arrières… grand-pères. Et je suis prêt à parier qu’ils sont probablement aussi vos ancêtres.
LES PERSONNAGES CÉLÈBRES DANS NOS LIGNÉES
Le Révérend Thomas Stoughton, mon 11ième arrière grand-père, est né à Sandwich, vers 1551, dans le comté de Kent en Angleterre. Il est décédé à Canterbury, dans le même comté, le 12 juin 1622. Curieusement il est mon parent, non pas par mon patronyme écossais Scott, mais par ma lignée maternelle française, les Gareau. Encore un coup de ces lignées enchevêtrées. Mais qui est ce personnage, vous demandez-vous? Et bien sa fille Elizabeth a des descendants célèbres et sa sœur Judith Stoughton est mon ancêtre. Voyons voir les conséquences de ces liens familiaux.
Ulysses S. Grant, né le 27 avril 1822 à Point-Pleassant, Ohion, É.-U., général de la guerre de Sécession et 18e président américain, mon 7e cousin du 5e degré.
Franklin Delano Roosevelt, né le 30 janvier 1882 à Hyde Park New York, É.-U., 32e président américain, mon 10e cousin du 2e degré.
Patrick Wayne Swayze, acteur américain, mon 11e cousin du premier degré.
Et connaissez-vous Madonna Louise Fortin? Elle est la mère de Madonna Ciccone. Eh oui! la controversée chanteuse est ma petite cousine.
Madonna, née le 16 août 1958, ma 7e cousine du premier degré.
Elle et moi avons le même arrière-arrière… grand-père, Charles Thomas Fortin, né en 1656 et décédé le 23 juin 1735, à L’Islet, Québec. Époux de Xainte Cloutier, il était lieutenant de milice du Cap St-Ignace en 1723.
Nous sommes parents par son fils Charles et la lignée est près de nous. Ma grand-mère, Fleur-Ange, était une Fortin et, comme je l’ai écrit précédemment, la mère de Madonna est une Fortin elle aussi. Fait intéressant à noter, ses grand-parents maternels; Willard et Elsie, sont des Fortin issus de la même lignée que Charles Thomas, notre ancêtre commun. Autrement dit, ils étaient eux-mêmes parents sans le savoir.
Mais, finalement, tout ceci n’a rien d’extraordinaire. C’est plutôt cocasse d’avoir trouvé ces informations amusantes en construisant mon arbre généalogique. Et je suis persuadé que si vous faites de même, vous aussi, vous découvrirez probablement de tels liens qui, avouons-le, ajoutent au plaisir d’effectuer ces recherches.
Mars 2001
À LA RECHERCHE DE SES ANCÊTRES
par Mario Scott
LES FILLES DU ROY
(A la mémoire d’Anne-Marie Von Seck)
Combien de fois avons-nous entendu dire: « Les filles du roy étaient toutes des filles de joie? » Ben voyons! Il ne faut tout de même pas généraliser. Il y a bien eu quelques cas particuliers, certes, mais mettons donc les pendules à l’heure une fois pour toutes.
Tout d’abord, savez-vous que certaines de ces filles proviennent de familles nobles? On en dénombre 38, dont 4 à Ville-Marie parmi lesquelles ma 8ième arrière-grand-mère, Anne-Marie Von Seck, nom qui fut francisé en Phansèque sur son acte de mariage du 7 novembre 1673. Il est difficile d’imaginer que cette « noblesse » aurait été enchantée de faire la traversée vers la Nouvelle-France en compagnie de filles à la réputation douteuse. Qu’en pensez-vous?
Qu’est-ce qui pouvait bien motiver la jeune demoiselle à vouloir devenir l’une des pionnières de ce nouveau pays, sur ce continent lointain et méconnu? Il faut savoir qu’en Europe, au XVIIième siècle les parents choisissent le futur mari de leur fille. Il est donc intéressant de s’engager à l’invitation du roy lorsqu’elle sait qu’elle pourra choisir, elle-même, son époux. Liberté d’ailleurs confirmée dans cet édit du roy du 28 novembre 1663. Il est interdit » …à toute personne d’empêcher les filles venues de France aux frais du roy de se marier quand bon leur semblera« .
Une autre raison de fuir le vieux pays? Cet extrait de « Marguerite Pasquier, fille du roy, chronique de la Neufve-France », écrit par Renée Blanchet et publié chez Les Éditions Varia, illustre bien ce que c’est que de vivre, à cette époque, dans une grande ville d’Europe: « Les premières impressions qui frappèrent Marguerite en arrivant à Paris, furent la puanteur et la promiscuité; elle n’avait jamais vu autant de mendiants rassemblés« . Imaginez le contraste lorsqu’on décrivait la nouvelle colonie, de l’autre côté de la mer, comme un pays immense, jeune et beau, peu peuplé et plein de richesses, où les forêts et les rivières abondent. La fille du roy n’hésitait pas à s’embarquer pour cette destination pleine de promesses avec, dans ses bagages, vêtements et argent gracieuseté de Sa Majesté Louis XIV?
On n’imposait donc pas aux filles du roy à s’engager avec le premier venu. Mais le but du souverain français était de peupler la nouvelle colonie. Alors à défaut d’imposer un mariage rapide aux filles, on a tout simplement utilisé un autre moyen afin de créer les unions. Il était obligatoire au début de la colonie, en Nouvelle-France, de posséder un permis pour la pêche et la chasse. Dans cette contrée sauvage, où l’agriculture n’existait pas encore ou à peine, ces activités essentielles étaient une question de survie. Les autorités en place, responsables de la colonisation, décidèrent tout simplement de forcer les hommes célibataires, dont plusieurs étaient des vétérans du régiment De Carignan, à prendre épouse. Ils devaient contracter mariage dans un délai de deux semaines après l’arrivée d’un nouveau contingent de filles du roy. A défaut de quoi ils perdaient leur permis. Le vaillant colon, qui voulait se marier dans le délai prescrit, s’empressait donc d’ériger une cabane de bois rond et de défricher sa terre afin d’impressionner la belle qui arrivait, et tenter de conserver son gagne-pain.
Voyons maintenant quatre cas de filles du roy, dont l’histoire a retenu les écarts de conduite. Deux d’entre elles sont mes ancêtres. J’ai effectué des recherches, en particulier, sur l’une d’elle. Malheureusement, pour ces marginales, ce sont souvent les circonstances de la vie qui a fait qu’elles aient été pointées du doigt.
Plusieurs filles du roy, il est vrai, provenaient de milieux défavorisés des grandes villes. Certaines étaient seules, abandonnées, et d’autres avaient commis des délits mineurs. Elles étaient envoyées à La Salpêtrière, un bâtiment qui abrite aujourd’hui l’hôpital parisien, du XIIIième arrondissement, réputé en neurologie.
L’une d’elle, Marguerite Pasquier, elle aussi ma 8ième arrière-grand-mère, y fut envoyée en juin 1660, à l’âge de 15 ans. Elle fuyait une belle-mère âgée qui ne l’aimait pas, envieuse de sa jeunesse et de sa beauté. Marguerite avait appris de sa mère, Vincente Beaumont, l’art de la dentelle. Elle n’avait que 13 ans lorsque celle-ci décéda en couches en novembre 1658. La seconde épouse de son père, Renée Guillocheau, interdisait à sa belle-fille de s’adonner à son art, qu’elle aimait tant, en lui imposant plutôt de faire les mêmes travaux que les garçons.
Partie de St-Paul de Poitiers, Marguerite a voyagé avec une troupe de comédiens qui se dirigeaient vers Paris. Au cours du voyage, comme elle était sans le sou, ces derniers ont eu la gentillesse de lui donner du pain et de l’eau. En arrivant dans la grande ville la faim la tenaillait. Devant l’étal d’un marchand, elle contemplait un morceau de fromage qu’elle ne pouvait se payer. Ce dernier le lui offrit. Mais au moment où elle le porta à sa bouche, il cria: « Une voleuse! Une voleuse!… ». Et on connaît la suite. Il est facile d’imaginer qu’en voyant cette jolie jeune fille, seule, il lui demanda, en retour, des faveurs qu’elle refusa tout en prenant ce morceau de fromage. De là, la vengeance du marchand. Mais, heureusement, sans ce séjour à La Salpêtrière, elle ne serait pas venue en Nouvelle-France, en septembre 1670, et vous ne seriez pas entrain de lire cette chronique.
Marguerite Pasquier, qui a fondé deux familles, est la fille de l’ancêtre des Paquet(te). Louis, un descendant, s’est marié à Saint-François de Sales.
Ma 8ième arrière-grand-mère, Anne-Marie Von Seck, dont le nom a aussi été francisé en Vanzaigue, Fannexeke, Phanzègue… est native de Hambourg, en Allemagne. Issue d’une famille noble, son père, Christian Von Seck, était capitaine de cavalerie dans les troupes impériales. Fille du roy, elle est arrivée à l’âge de 16 ans, en Nouvelle-France, en 1673. Sa protectrice était la bienheureuse Marguerite Bourgeoys et Anne-Marie demeura à la métairie de la Pointe St-Charles. Au plaisir de découvrir cette ancêtre, succéda une déception et le désir d’en savoir plus.
En consultant la base de données du site Adhémar, du Groupe de recherches sur Montréal, du Centre canadien d’architecture (http://cca.qc.ca/adhemar/), j’apprends que mon ancêtre Anne-Marie a été une prostituée du 9 avril 1692 au 31 décembre 1704. Pas trop réjouissant d’apprendre cela, ne doutant pas une seconde de la véracité de ces informations chronologiques précises.
Mais où avait-on pris ces renseignements? Faute d’espace, je m’en tiens à l’essentiel de mon travail de recherches.
Je suis entré en contact avec Monsieur Léon Robichaud, l’un des responsables du groupe de recherches sur Montréal et webmaître du site internet Adhémar, dont les études consistaient à établir, à partir du XVIIième siècle, ce que j’appellerai, un index aux immeubles de nos ancêtres. Il m’a alors appris la source de ces informations; les archives judiciaires et notariales de Montréal. Il ajouta que l’on parlait d’Anne-Marie dans le livre de Robert-Lionel Séguin, « La vie libertine en Nouvelle-France au dix-septième siècle », dont je me suis empressé d’acheter une copie.
Finalement, grâce à son aimable collaboration, j’ai eu le plaisir de pouvoir consulter le dossier complet sur mon ancêtre Anne-Marie Von Seck, au Centre canadien d’architecture, à Montréal. J’ai fait une soixantaine de photocopies de documents intéressants, parmi lesquels une copie de l’acte de son second mariage le 15 mars 1682. Cela m’a permis de comprendre, je croîs, ce qui s’est probablement passé dans sa vie.
D’ailleurs, voici un extrait du courriel que Monsieur Robichaud m’a envoyé le 3 octobre 1999: « Anne-Marie Vanzègue n’aura certainement pas eu la vie facile. Selon les sources judiciaires et notariales que nous avons consultées, elle n’aurait pas été prostituée avant le décès d’Hubert Leroux, son premier mari. Il est à noter que son second mariage n’a pas été très heureux. Elle a obtenu une séparation de corps et de biens de Gabriel Cardinal (homme ivrogne et très violent – selon les documents judiciaires de l’époque), ce qui est alors une procédure peu courante (en 1693). Il serait possible d’écrire une biographie assez intéressante de votre ancêtre (voir même une mini-série télévisée)… ».
Fait à noter, son contrat de mariage avec Hubert, un marchand de fourrure et de pelleteries, fut signé en la maison des filles de la Congrégation de Notre-Dame où Anne-Marie était pensionnaire. On fait mention, dans celui-ci, de la présence de plusieurs personnes importantes de Ville-Marie, témoins au mariage.
Anne-Marie Von Seck était propriétaire, légataire de son premier mari, d’une maison en planches de bois, sur le lot 214, face et en biais de la Place D’Armes, qu’elle conserva après sa séparation en 1693. Je possède la copie d’un document notarié, daté de 1719, dans lequel Jean Cardinal, le fils unique du second mariage d’Anne-Marie, prétend être orphelin de père et de mère, dans le dessein de s’approprier les biens de cette dernière à titre d’unique héritier. Son père était décédé, mais sa mère était toujours vivante! Que penser de tout cela?
En colligeant ces documents, en étudiant ces parcelles d’éléments de la vie d’Anne-Marie, 278 ans plus tard, on comprend sa détresse.
Anne-Marie Von Seck est décédée le 4 décembre 1722 et fut inhumée dans le cimetière Saint-François de Sales de l’île Jésus. Inconnue, le prêtre Julien inscrivit dans l’acte de décès qu’on la connaissait, dans les « costes » sous le nom de la « bonne femme Cardinal ». On croyait alors que la première allemande au pays était d’origine irlandaise.
Les deux autres cas connus de libertinage sont ceux d’Anne Lamarque dite la Folleville, une cabaretière qui tenait un « berlan » (une auberge, maison de jeux), à Ville-Marie. Elle a eu des démêlées avec la « maréchaussée » (police de l’époque) car cette pharmacopée vendait des philtres d’amour (des liqueurs aphrodisiaques). Françoise Nadreau dite St-Martin, quant à elle, était aubergiste à La Chine. Il lui sera interdit de tenir cabaret en raison « des désordres Et Exès qui sy sont Commis… Y souffrant des Ivrogneries Nottoires Et scandaleuses » (sic). …
Alors, si nous considérons ces quatre cas connus (quoiqu’il puisse y en avoir quelques autres) sur un total de 900 filles du roy venues en Nouvelle-France, je croîs que nous sommes loin de la vérité en généralisant au sujet de leurs mœurs.
Je termine en vous citant un dernier fait historique. Il illustre bien le souci qu’avaient les autorités de la moralité des ces demoiselles. Et la qualité des commanditaires qui avaient à cœur le peuplement de la Nouvelle-France et l’évangélisation de cette colonie.
Les archives démontrent qu’une des filles du roy, Françoise Goubilleau, encore ma 8ième arrière-grand-mère, aurait été la surveillante, la matrone d’un contingent de la recrue de 1670. Veuve du bourgeois Augustin Maguet, de Paris, elle arrive à Ville-Marie à 33 ans avec son fils Pierre, âgé de 7 ans. Outre son âge, le fait qui nous fait penser qu’elle aurait été en charge des filles du roy, c’est qu’elle a été le témoin de 8 des 11 mariages de ces dernières à l’église Notre-Dame de Montréal. Un autre élément pour appuyer cette thèse se trouve dans l’acte notarié du mariage de Marguerite Françoise Moreau. Françoise Goubilleau y est mentionnée comme étant « la mère de ladite épouse l’ayant passée de France » (sic).
Pour son voyage, et peut-être ses services, mon ancêtre a reçu une rente de deux cent livres tournois du baron Pierre Chevrier, seigneur De Fancamp, prêtre de Paris et ami de La Dauversière. Peut-on encore douter de la réputation de la majorité ces valeureuses pionnières?
Le 17 octobre 1647 Françoise épouse Paul Dazé. Leur fils unique, Paul-Charles, mon 7ième arrière-grand-père, vint s’établir en 1707 à Saint-François de Sales. Il était premier capitaine de milice de cette paroisse. Plusieurs de ses descendants ont aussi été officiers dans la milice, dont au cours de la guerre de 1812, dans le bataillon 106A de la division de l’Isle Jésus. Une famille souche importante impliquée dans l’ordre et la défense de notre seigneurie.
Ayons donc une bonne pensée pour nos vaillantes et courageuses ancêtres, filles du roy, ainsi qu’à leurs compagnes, décédées au cours de la traversée, qui n’ont pas eu la chance de fouler le sol de leur nouvelle patrie.
Et pourquoi ne pas aller visiter l’endroit où elles furent accueillies, à Ville-Marie, à la métairie de Marguerite Bourgeoys? La Maison St-Gabriel, 2146, place Dublin, Pointe-St-Charles, Montréal, H3K 2A2. Les visites guidées sont aux heures. Coût: $15.00. Rens.: 514-935-8136. Courriel: info@msgmusee.ca – Leur site internet: http://www.maisonsaintgabriel.ca
Juin 2001
À LA RECHERCHE DE SES ANCÊTRES
par Mario Scott
L’ORTHOGRAPHE ET LE VOCABULAIRE DE LA NOUVELLE-FRANCE EN 1673
La recherche généalogique nous amène obligatoirement à consulter des archives. Il arrive que ces documents, vieux de quelques siècles, soient difficiles à lire. Quelle curieuse orthographe on utilisait en ce temps-là ! Et que dire du vocabulaire de nos ancêtres. J’ai fouillé mes notes afin d’en partager quelques-unes avec vous. Des petites choses intéressantes que j’ai trouvées lors de mes recherches. Rien de prétentieux car je ne suis ni paléographe ni linguiste. Juste des petits clins d’œil sur le passé, pour notre plaisir.
L’orthographe et la ponctuation
Aux environs du XVIIième siècle il n’existe à peu près pas de ponctuation dans l’écriture de la langue française. Et que dire de l’orthographe dont voici un exemple tiré d’un document d’époque :
« …ay enterré…le corps d’une vieille dame…, Irlandoise de nation, dont je n’ay pu sçavoir ny le nom de bapteme ny celuy de famille, …connue dans les costes…, morte hier au soir…, elle avait demandé un prestre… »
(Extrait du certificat d’inhumation de ma 8ième arrière-grand-mère, d’origine allemande, Anne-Marie Von Seck, inhumée, à Saint-François de Sales, le 5 décembre 1722)
On constate, dans cet extrait, que l’accent circonflexe est remplacé pas un « S », dans les mots « costes » (côtes) et « prestre » (prêtre). De plus, on a utilisé la voyelle « Y » au lieu du « I » (ay, ny, celuy). Remarquez aussi comment le rédacteur, un prêtre, a écrit le mot « sçavoir ».
On orthographie, parfois, certains mots avec un accent aigu, comme dans le document précédent pour le mot « demandé », mais ce n’est pas fréquent.
Il n’est pas rare de lire les patronymes Ménard, Bénard, Décarie et Benoît orthographiés ainsi: Mesnard, Besnard, Descary et Benoist. On utilise donc un « S », non seulement à la place de l’accent circonflexe, comme pour les mots précédents, mais aussi en remplacement, si je peux m’exprimer ainsi, de l’accent aigu.
Vous avez sans doute aussi remarquer que nos ancêtres utilisaient la lettre « F » en lieu et place de la consonne « S ». Un fubfequent (subséquent) mariage, fur ceux (sur ceux), qui fe marient (qui se marient), eft la caufe (est la cause), font (sont) de mauvaise humeur.
De plus, on écrivait « Irlandoise« , comme on peut le constater dans le premier exemple, « Anglois » et « François« , plutôt que « Irlandaise », « Anglais » et « Français ». Même certains noms de famille, comme « Caron », subissait le même sort; « Coron« . Un de ces mots désignant une nation: Anglois (anglais), est devenu un nom de famille fort populaire encore aujourd’hui ; le patronyme Langlois (l’anglais).
Une petite anecdote énigmatique? Abraham Martin, dit l’Écossais, en l’honneur de qui les plaines de Québec furent nommées, était marié à Marguerite Langlois. Un écossais et une descendante « angloise » ?
Certains mots se terminant, aujourd’hui, en « É », comme « dé », ou en « ET », comme « beignet », s’écrivaient avec un « Z ». Ces mots se lisaient à l’époque « dez » et « baignez ».
Pour le féminin de « Neuf » nos ancêtres semblent hésiter entre la forme masculine et la forme féminine. Le mot devient « Neufve« . Comme on peut le constater dans l’orthographe de « Neufve-France » (Nouvelle-France).
L’imprimerie
Plus tard, lorsque l’on a commencé à imprimer des documents, la lettre « W » n’existait pas. Du moins chez les artisans. Après s’être penché sur le problème, ils ont trouvé cette solution orthographique faisant fi de la façon dont les lecteurs prononceraient cet amalgame. Ils ont tout simplement substitué la consonne « W » par deux autres lettres de l’alphabet. Les voyelles « O » et « U ». Mais comme il s’agit de deux lettres pour n’en remplacer qu’une, on a tout bonnement mis ces lettres l’une par-dessus l’autre. Cela ressemble typographiquement au chiffre « 8 ». Ainsi, le nom de l’ancêtre algonquienne de mon épouse, Marie Mitcominqui Mitéwamégoukwé, apparaît de cette façon : « Mite8amegouk8e ». Tentez l’expérience, essayez de lire ce patronyme à voix haute.
Le vocabulaire
Tenez, faisons un petit exercice.
Nous sommes en 1673.
« La mère demanda à sa fille aînée de lui donner la baille et de passer le ballay pendant qu’elle prépare des baignez et met de la basane sur les pantoufles ».
Avez-vous réussi à décoder les mots dans cette phrase ? Pas évident, n’est-ce pas ? Voici la solution.
La mère a demandé à sa fille de lui donner un seau (sorte de récipient de bois), de passer le balai, fabriqué avec des rameaux de cèdre (imaginez ce que cela devait avoir l’air en sachant que c’est de là que nous vient l’expression « fou comme un balai (de cèdre) »), pendant qu’elle prépare les baignez, vous l’avez sans doute deviné, ce sont des beignets (cuits dans la graisse bouillante) et la basane est une peau de mouton dont on se sert pour couvrir les livres, les pantoufles…
Nos ancêtres savaient tout de même s’amuser. A l’occasion ils allaient dans un berlan, une maison où on « donne publiquement à jouer aux dez ou aux cartes ».
Si je vous dis « billet« , cela vous fait penser à une contravention ou à un billet doux, une monnaie d’échange ? Mais ce n’est pas cela du tout. En Nouvelle-France, le billet en question était indispensable pour le soldat du régiment De Carignan. Son officier lui assignait un endroit où loger, chez un habitant, grâce à un billet signé que le pensionnaire devait conserver sur lui. A noter que le mot « habitant » désignait les cultivateurs et n’était pas du tout péjoratif. Nos ancêtres, d’ailleurs, étaient fiers d’être appelés ainsi. Le terme décrivait « celui qui habite et cultive cette terre » et non pas une classe « sociale ».
Tenez, si vous me le permettez, profitons en afin de clarifier une fois pour toute cette croyance. Le « H » sur l’écusson du Canadien ne veut pas dire « Habitant ». Même si les anglophones scandent « Go Habs, Go ! », cela n’a rien à voir. Il signifie « Hockey ». Sur le sigle nous retrouvons deux « C », un bleu et un rouge, et un « H » pour « Club de Hockey Canadien »). Bon ! Pardonnez-moi de m’être égaré, revenons à nos moutons.
Tout le monde sait ce qu’est une « cabane ». Mais en ce XVIIième siècle, ce n’est pas ce que vous croyez! La cabane, chez nos ancêtres, était un assemblage de planches, mesurant de cinq à six pieds de hauteur par quelque sept pieds de longueur. Les ouvertures étaient closes par des rideaux. C’est la version québécoise d’un meuble normand ; le lit-alcôve. La cabane était ordinairement placée dans un coin de la pièce afin d’éviter que le froid n’y pénètre. C’était donc là où dormait notre ancêtre, l’hiver, afin de se protéger des rigueurs du froid.
Tiens un mot ancien « cannessons » qui phonétiquement se ressemble encore de nos jours. Vous avez deviné qu’il s’agit de caleçons. Mais oubliez le confort du coton ou autre. A cette époque ils sont faits de cuir et sont surtout portés par les hommes, au cours de la seconde partie du XVIIième siècle. En fait cet article ressemble au « brayet » que les Indiens portent et que l’on voit dans les films westerns. Un spécimen de ce sous-vêtement fut trouvé lors de l’inventaire de la garde-robe du sieur De Brucy, après son décès, le 15 ou 16 octobre 1674.
Pauvre petit champis ! Il s’agit d’un enfant illégitime.
Si vous « désemparez » votre femme ou votre mari, à cette époque, vous la ou le quitter, l’abandonner. Comment ne pas l’être si cela est inattendu?
Si c’est elle qui désempare, il y a de fortes chances que son mari soit un cornard.
Du moins c’est ainsi que l’on se serait moqué de lui, car elle lui aurait fait porter des cornes.
Tout le monde connaît le fisque. Cette version ancienne désigne, au XVIIième siècle, le trésor royal.
Aujourd’hui on va au guichet automatique pour faire ses transactions bancaires. Mais à cette époque, le guichetz sert plutôt aux gens peu recommandables. Il s’agit des portes d’une prison, par où passe le prisonnier lorsqu’il est écroué.
Vous faites flores lorsque vous faites de la dépense qui éclate, qui vous donne l’avantage sur les autres de même condition.
Pour se protéger des rigueurs de l’hiver, la femme se vêtait de trois jupes. Chacune d’elle était désignée sous un nom différent. Celle que l’on voyait s’appelait la modeste. Sous celle-ci elle portait la friponne. Et, en-dessous, celle que l’on ne voyait jamais… la secrète.
Au retour du beau temps, la paysanne porte un jupon de tissu grossier appelé le cotillon. On disait, alors, « courir le cotillon ». Expression qui est fort probablement l’ancêtre de la version moderne « courir le jupon ». Autre temps, même mœurs.
J’espère que ce petit lexique historique, sans prétention, aura l’heur de vous plaire et que vous ne lirez plus jamais de la même façon ces documents de notre passé.
Septembre 2001
À LA RECHERCHE DE SES ANCÊTRES
par Mario Scott
La généalogie : un héritage
(Mise en garde: Prenez note qu’il est possible que les coordonnées des organismes aient été changées, cet article date de quelques années)
Antoine de Saint-Exupéry a écrit: « Ce qui se transmettait ainsi de génération en génération avec le lent progrès d’une croissance d’arbre, c’était la vie mais c’était aussi la conscience. Quelle mystérieuse ascension!. D’une lave en fusion, d’une pâte d’étoile, d’une cellule vivante germée par miracle nous sommes issus, et, peu à peu, nous nous sommes élevés jusqu’à écrire des cantates et à peser des voies lactées.
La mère n’avait point seulement transmis la vie : elle avait, à ses fils, enseigné un langage, elle leur avait confié le bagage si lentement accumulé au cours des siècles, le patrimoine spirituel qu’elle avait elle-même reçu en dépôt, ce petit lot de traditions, de concepts et de mythes qui constitue toute la différence qui sépare Newton ou Shakespeare de la brute des cavernes. » (Extrait de Terre des Hommes)
Voilà l’héritage de nos ancêtres. Nous avons en nous une parcelle de chacun d’eux. Quelle extraordinaire aventure que de tenter de découvrir qui ils étaient. Et vouloir perpétuer ce magnifique héritage, en léguant le fruit de vos recherches à vos enfants et à vos descendants, quelle motivation!
Vous avez décidé de vous y mettre? Bravo! Dans ce cas, voyons voir par où commencer.
LES PREMIÈRES SOURCES D’INFORMATION : LES PARENTS
Tout d’abord, débutez votre quête de renseignements en consultant vos parents et, si vous avez la chance qu’ils soient encore vivants, vos grands-parents. Notez toutes les informations dont ils se souviennent; les noms, les années, les endroits et les anecdotes… Même celles qui semblent anodines. Vous découvrirez assez tôt que la généalogie est parfois un travail d’enquête où le détail est d’une grande utilité.
LA CONSERVATION DE VOS DONNÉES
Si vous possédez un ordinateur, procurez-vous un logiciel de généalogie. Il existe plusieurs produits sur le marché, à des prix différents. Vous pouvez aussi vous procurer un gratuiciel ou une version d’essai sur l’Internet (la quantité de noms que l’on peut y entrer est limitée). Le produit acheté vous permet d’emmagasiner des milliers de noms de plus, de conserver des notes, de sauvegarder des photographies et il vous permet de créer des rapports sur vos ancêtres. Si vous n’avez pas d’ordinateur, demandez à un de vos collègues internaute, de vous copier les fiches, sur lesquelles vous pourrez inscrire le fruit de vos recherches, à partir du site du Centre de généalogie francophone d’Amérique (adresse ci-dessous).
L’INTERNET
Voici une liste sommaire de sites intéressants et utiles pour vos recherches :
– Le Centre de généalogie francophone d’Amérique
Ce site comprend de nombreuses biographies de nos ancêtres, une base de données comprenant plusieurs arbres généalogiques, un forum, des outils que vous pouvez imprimer, des nouvelles etc. Vous devez être membre mais l’adhésion est gratuite.
http://www.genealogie.org/accueil.htm
– Le Programme de recherches en démographie historique de l’université de Montréal
Un site payant mais sur lequel une abondance d’information est accessible gratuitement.
http://www.genealogie.umontreal.ca/fr/main.htm
– La chambre des notaires du Québec
En consultant la banque de données Parchemin vous aurez accès à 30,000 extraits d’actes notariés rapportant les transactions de nos ancêtres, entre 1635 et 1800.
http://www.cdnq.org/index_archiv.htm
– Le Centre canadien d’architecture
Adhémar, sur ce site, est une banque de données qui nous permet de trouver l’endroit exact où nos ancêtres ont été propriétaires d’immeubles, à Montréal, au XVIIe et au XVIIIe siècle. Une foule de renseignements est disponible. Voyez qui était les voisins de votre ancêtre au XVIIe siècle. La base de données couvre la période de 1642 à 1704 et les années 1725, 1765 et 1805. Vous devez vous enregistrer comme chercheur mais cela est gratuit.
– Le musée virtuel de la Nouvelle-France
Plusieurs chroniques historiques, entre autres, sur les filles du roi, les soldats du régiment de Carignan, les seigneurs… Aussi des banques de données, des cartes anciennes, des liens… Quoique ces textes soient gratuits il y a une page sur la généalogie accessible moyennant des frais.
http://www.mvnf.civilisations.ca/
– Notre mémoire en ligne: des livres d’histoire gratuits
Voici une magnifique banque de données où des milliers de livres d’histoire sont numérisés et accessibles sur ce site. Il s’agit en fait du patrimoine imprimé du Canada. Vous pouvez les consulter, les sauvegarder, les imprimer. La recherche s’effectue par le titre du volume recherché, le nom de l’auteur, de l’éditeur… On peut aussi bouquiner par le sujet.
http://www.canadiana.org/ECO/mtq?language=fr
– Les Archives Nationales du Canada
Un site volumineux qui regorge de sources de documentation. Vous pouvez emprunter gratuitement, des Archives Nationales, des documents microfilmés par l’intermédiaire de votre bibliothèque municipale. Registres d’immigrants venus par bateaux, recensements…
http://www.archives.ca/index.html
– Cours de paléographie
Un cours gratuit sur l’écriture ancienne vous intéresse? Vous aimeriez pouvoir déchiffrer les documents que vous consultez? Ce site a été conçu par Stéphane Pouyllau, étudiant à l’Institut d’histoire de l’université Michel de Montaigne, à Bordeaux, en France. Le cours comprend 13 leçons.
http://www.multimania.com/voirin/paleo/html/sommaire.html
– Genforum
Un forum est un site où vous écrivez vos demandes, lisez celles des autres et, si le cœur vous en dit, répondez à celles-ci. Comme vous y laisser votre adresse de courriel, on vous écrit parfois. Celui-ci est anglophone et la recherche peut se faire par patronyme.
http://genforum.genealogy.com/
- Canada mailing lists (Listes d’échanges d’informations généalogiques)
En adhérant à une liste d’échanges généalogiques, par courriels, vous recevez les informations dans votre boîte de courrier électronique. Contrairement au forum où vous devez toujours revenir sur le site. La plupart des listes sont anglophones.
http://www.rootsweb.com/~jfuller/gen_mail_country-can.html
LES CENTRES DE CONSULTATION
Il existe plusieurs endroits, facilement accessibles, où vous pouvez consulter des documents. Hormis les bibliothèques, tous les centres sont gratuits.
- Les Archives Nationales du Québec
« Les Archives », comme on appelle cet endroit, sont situées au:
535, avenue Viger est, Montréal, – tél. : 514-873-6000 – télécopieur : 514- 873-2980.
Horaire (pour les manuscrits et microfilms):
lundi, mardi, vendredi et samedi de 10H00 à 16H30
mercredi et jeudi de 10H00 à 21H00
Il est obligatoire de prendre un rendez-vous afin de consulter les archives cartographiques, iconographiques et audiovisuelles.
Site Internet (avec le moteur de recherche Pistard): http://www.anq.gouv.qc.ca/
- Le Centre d’Histoire Familiale des Mormons
Les Mormons ont microfilmé des millions de documents à partir du XVIIe siècle. Ils conservent les originaux dans une voûte, dans une montagne, à Salt Lake City. Des copies peuvent être consultées gratuitement dans un centre d’histoire familiale régional, dont celui de Montréal-Laval.
1777, rue Delorimier, Montréal – tél. : 514-523-6131 (il y a un stationnement gratuit à l’arrière de l’édifice).
Horaire : mardi de 19H00 à 21H30
mercredi de 9H00 à 13H00 et le soir de 19H00 à 21H30
et jeudi de 9H00 à 13H00
Il n’est pas nécessaire d’être membre de cette église pour consulter les documents. Ils se réservent toutefois le droit de vous faire remplir un questionnaire mais sans conséquences.
Site Internet : http://www.familysearch.org/
- La Bibliothèque Centrale de Montréal
Il faut être membre de la bibliothèque afin de pouvoir consulter les archives, dans la réputée salle Gagnon, fréquentée aussi par nos voisins américains. Le coût de l’adhésion des personnes adultes ne résidant pas sur le territoire de Montréal est de $88 par année. Pour les aînés (55 ans et plus) le coût est de $56 pour l’année.
1210, rue Sherbrooke est, Montréal – tél. : 514-872-5923 (le stationnement, face au bâtiment, est situé du côté nord de la rue et vous devez payer).
Horaire : lundi et jeudi de 10H00 à 18H00
mardi et mercredi de 10H00 à 22H00
vendredi de 12H00 à 18H00, samedi et dimanche de 10H00 et 13H00 à 17H00
- Le Centre de Ressources Documentaires Alain-Grandbois
La ville de Laval a regroupé et centralisé, tous les documents généalogiques des bibliothèques de l’île Jésus.
4300, boulevard Samson, Chomedey, Laval (à l’ouest du boulevard Curé-Labelle) – tél. : 450-978-3671 – télécopieur : 450-686-8270 – courriel: biblio.crd@ville.laval.qc.ca
Horaire : mardi au vendredi de midi à 21H00
samedi de 9H00 à 17H00 et dimanche de 13H00 à 17H00
- La Société d’histoire et de généalogie de l’île Jésus
Finalement, il n’est absolument pas question, évidemment, que je passe sous silence notre société. Vous trouverez les coordonnées de celle-ci à la page 2 du bulletin. L’horaire pour la consultation au centre de documentation s’y trouve également, ainsi que moult renseignements sur la société.
D’ailleurs, la SHGIJ offre un cours « Initiation à la généalogie », pour tous, et un atelier « Internet et la généalogie », réservé aux membres. Ce cours et l’atelier sont sous la responsabilité de Monsieur Roland Coulombe. Pour de plus amples informations, communiquez avec la société au 450-681-9096 ou consultez notre site Internet à http://www.genealogie.org/club/shgij/
DOIT-ON TOUJOURS PAYER POUR NOS RECHERCHES?
J’espère que cette liste exhaustive vous sera utile pour vos recherches. Elle ne représente, cependant, qu’une infime partie des nombreux endroits et sites internet traitant du sujet. Vous ne tarderez pas à en découvrir plusieurs autres.
Rappelez-vous qu’il n’est pas toujours nécessaire de débourser de l’argent. Plusieurs ressources sont à notre disposition gratuitement. Il s’agit de les trouver. Je vous mets cependant en garde contre une certaine forme d’exploîtation malhonnête. Malheureusement, vous rencontrerez quelques personnes qui font le commerce des informations qu’elles ont elles-mêmes obtenu sans déboursé un sou, sans se soucier de leur exactitude, qu’elles ont glané ici et là. Alors, pour contrer ce fléau, plus il y aura de gens qui publieront volontairement leurs données sur l’Internet, et échangeront le fruit de leurs recherches, moins il sera possible à ces « marchands » de les vendre.
Les frais d’adhésion à des sociétés, des frais de photocopies, de consultation… sont des dépenses normales. Elles sont la plupart du temps peu coûteuses et elles servent à éponger les frais administratifs. Les coûts des abonnements à des revues et d’achat de livres sont souvent des investissements rentables, pour vos recherches, en terme de gain de temps entre autres. Mais assurez-vous que l’information que vous obtiendrez en vaut la chandelle. N’achetez pas un livre de 300 pages dont seulement deux paragraphes concernent votre ancêtre. Allez plutôt l’emprunter à la bibliothèque.
Alors passionnés d’histoire et de généalogie, je vous souhaite des heures de plaisir dans votre recherche du passé. Et souvenez-vous qu’il s’agit d’un regard en arrière, certes, mais de ce que nous sommes.
Je termine en vous citant un vieux proverbe chinois :
« Ne pas connaître ses ancêtres, c’est comme un ruisseau sans source, un arbre sans racines ».
Décembre 2001
À LA RECHERCHE DE SES ANCÊTRES
par Mario Scott
La Nouvelle-France à l’époque de la seigneurie de l’île Jésus et de la fondation de Saint-François-de-Sales
A l’époque où fut fondée la paroisse de Saint-François de Sales, la première dans l’île Jésus, beaucoup d’événements tissaient l’histoire à l’ombre de ce berceau insulaire.
Il est intéressant de situer cette naissance dans le contexte de la Nouvelle-France de l’époque.
Laval: le seigneur de l’île Jésus
En 1674, de retour d’un séjour en France qui a duré quatre ans, Monseigneur François de Laval revient au pays avec le titre d’évêque de Québec qu’il est allé chercher en Europe. S’il n’a pu être nommé à ce poste prestigieux avant, c’est que des membres influents du clergé français lui étaient défavorables.
Il n’avait pas le choix s’il voulait s’imposer en Nouvelle-France. Arrivé à Québec le lundi 16 juin 1659, alors que la colonie ne comptait que 2000 âmes, dont 1200 à Québec, il avait créé un tribunal ecclésiastique, indépendant du pouvoir civil. Le contrôle du clergé sur les colons s’amplifiait.
A cette époque, l’orgueil, le besoin de prestige et la quête du pouvoir dictent parfois une conduite irréfléchie. Comme celle-ci. François de Laval se chicanait avec le gouverneur d’Argenson pour l’honneur d’occuper le prie-Dieu dans le chœur de l’église. Et ce qui n’arrange pas les choses, les jésuites étaient alors en constant conflit juridique avec les sulpiciens… En si petit nombre et tant de pouvoir. A ce moment-là on compte 17 jésuites et 4 sulpiciens, pourtant les seigneurs de l’île de Montréal. Une rivalité jésuite sulpicienne, Québec Montréal, ça ne vous rappelle pas celle des Nordiques et des Canadiens?
En 1663 François de Laval fonde le séminaire de Québec et il « impose », à ses ouailles, une dîme au treizième (parce qu’en réalité un dîme veut dire un dixième). A chaque récolte de 13 sacs de pommes de terre, 13 paniers de pommes ou 13 sacs de grains, l’habitant doit en donner un au séminaire. Cette « récolte » du séminaire devient la révolte des colons. Devant l’impopularité de son geste il commettra une gaffe en réduisant cette taxe aux habitants de Québec seulement. La rivalité commence…
C’est un mardi, le 24 avril 1674, que Monseigneur de Laval devient le seigneur de l’île Jésus. Il fera don de sa concession, le vendredi 12 avril 1680, au séminaire de Québec. La ratification de cet acte ne sera confirmé que beaucoup plus tard.
Il tombe soudain très malade et il songe à sa succession. Il choisit Jean-Baptiste de La Croix de Saint-Vallier pour le remplacer éventuellement. Décision qu’il regrette par la suite à un point tel qu’il lui demande de démissionner. Son successeur n’est que vicaire à ce moment-là. Mais ce dernier est loin de laisser tomber son ambition. Au contraire, le religieux compte bien prendre sa revanche. Lorsque Saint-Vallier est finalement nommé évêque, il décide le dimanche 25 janvier 1688, d’interdire de séjour à Québec Monseigneur de Laval. Ce dernier s’exilera à Cap Tourmente. Saint-Vallier est enfin débarrassé de son rival.
En 1681, la vie n’est pas facile. Semer ses champs avec le mousquet à la main n’est pas une sinécure. Défricher à la main, en redoutant une attaque iroquoise, n’est pas non plus chose facile. Toutefois, ce coin de pays dans la seigneurie se développe lentement mais sûrement. Ce sont 27 valeureux pionniers qui habitent dans l’est de la seigneurie de l’île Jésus. Ils ne forment que quatre familles. Ce sont celles de Guillaume Label, premier colon, de son beau-père Olivier Charbonneau, de Michel Buisson et de Léonard Etier.
A l’aube de la naissance de la première paroisse
Au mois de novembre 1698, la colonie perd un de ses illustres personnages, du moins le croit-elle, en Louis de Buade comte de Palluau et de Frontenac. L’individu, décrit par Louis-Guy Lemieux comme étant « un gouverneur incompétent, un piètre soldat et un trafiquant sans foi ni loi », décède. Louis-Hector de Callière, devient alors gouverneur par intérim de la Nouvelle-France.
La population de l’île Jésus, plusieurs fois décimée par les attaques iroquoises, ne compte alors 13 vaillantes personnes.
Le vendredi 23 octobre 1699, plus de 19 ans après qu’il leur fut donné, le titre de la concession de l’île Jésus est à nouveau confirmé au séminaire de Québec. Mais il n’est pas encore officialisé.
Un mois auparavant, Phipps est retourné penaud à Boston, avec une bande de soldats malades, à bord de ses navires. En représailles des raids cruels des canadiens contre la Nouvelle-Angleterre, il avait tenté de prendre Québec, par la voie de la mer. Mais notre majestueux Saint-Laurent ne se laisse pas naviguer si facilement. En 1994 l’épave de l’un de ces navires, le Elizabeth and Mary, fut retrouvée. Sur celle-ci, parmi les artefacts retrouvés, une broche en argent, un gage d’amour, a été reproduit et est en vente au Musée de la Pointe-à-Callière. Mon épouse a beaucoup apprécié ce cadeau réplique d’un bijou de 1690.
Une épidémie de variole fait rage dans la colonie et rafle 100 vies à Ville-Marie. Il n’y a pas que les amérindiens et les anglais dont il faut se méfier. Nos courageux colons ne se laissent cependant pas abattre par ces ravages.
Pendant ce temps, de l’autre côté de la rivière, la sécurité est un souci constant. On prolonge la palissade de Ville-Marie vers l’est afin d’inclure, entre autres, le couvent des jésuites dans l’enceinte.
Le mardi 12 janvier 1700, décède la bienheureuse Marguerite Bourgeoys, fondatrice de la congrégation de Notre-Dame, hôte de quelques filles du roi, à la Pointe St-Charles. Il est possible, aujourd’hui, d’admirer sa table, qui lui servait de pupitre, à la Maison St-Gabriel. Ce meuble fut à maintes reprises sauvé des incendies.
En ce début du XVIIIième siècle, 14 nouvelles concessions sont données dans l’île Jésus, principalement à la pointe est. Parmi ces nouveaux censitaires on dénote les Guindon, Filiatro, Chartran, Peyet (Payet), Dazé, Orieux, Migneron, Noël, Etier, Hogue… Il n’y a pas de routes sur l’île. On y accède par la voie des eaux; les rivières des Prairies et St-Jean ou Jésus (des Mille-Iles).
Enfin le pays va pouvoir respirer et prospérer suite à la signature de la Grande Paix de Montréal, le jeudi 4 août 1701. La troisième guerre iroquoise qui dure depuis 1684, vient de prendre fin. On consacrera alors ses énergies à créer un pays.
Saint-François-de-Sales; paroisse et village
Pendant près de sept ans le service religieux fut donné que sporadiquement aux habitants de l’est de l’île Jésus.
Le vendredi 3 mars 1702, on délimite les limites de la paroisse de Saint-François-de-Sales. Quoique n’ayant pas encore d’église, les paroissiens ont une petite chapelle sur le bout de l’île, où se trouve aujourd’hui la berge Charbonneau. Le curé Volant s’engage à célébrer régulièrement le Saint-Office à partir de cette année et il commence à tenir un registre des sacrements.
Malgré la possession du titre de la concession de l’Île Jésus, depuis 1680, année où Monseigneur de Laval le lui donna, le séminaire de Québec n’était pas encore officialisé à titre de seigneur. Et ce même si on confirma la chose en octobre 1699. On vient de fonder la première paroisse, alors pourquoi ne pas en profiter pour ratifier la propriété de la seigneurie à ces messieurs du séminaire? C’est ce que l’on fera le mardi 2 mai 1702.
A Montréal, beaucoup plus peuplé, c’est une toute autre histoire. C’est dans le climat conflictuel entre les jésuites et les sulpiciens, que les récollets débute la construction de leur ensemble conventuel. Ne voulant pas être en reste, ces messieurs récollets veulent quelque chose de beau, de prestigieux. Les travaux dureront donc onze ans pour se terminer en 1713.
En 1703, depuis deux ans on vit en paix avec les iroquois. Mais un autre fléau s’abat sur la colonie montréaliste. Une épidémie de variole, encore une, tue plus de 250 personnes dans l’île.
Cette année-là Philippe De Rigaud marquis de Vaudreuil devient le gouverneur de la Nouvelle-France.
Claude de Ramezay devient, en 1704, le gouverneur de Montréal. Jacques Levasseur de Neré dessine le premier plan de la ville depuis la construction de la palissade.
Saint-François-de-Sales continue sa progression, lente mais certaine, de sa démographie. On compte 361 personnes recensées dans la paroisse et combinées avec les résidants de Lachenaie. La Nouvelle-France, elle, compte 16417 habitants.
L’année suivante, comme Montréal est en plein essor et que la criminalité y progresse aussi, Pierre Couturier débute la construction des cachots. Travaux qui dureront jusqu’en 1709. Dans l’île voisine, chez nous, nous n’en sommes pas encore là.
En 1708, on débute l’agrandissement de la basilique Notre-Dame. Cette année est marquée par un autre événement important, le décès de François de Laval. Seigneur de l’île Jésus, de 1675 à 1680, il nomma la première paroisse du nom de son saint patron et de son prénom. Quelques siècles plus tard les villes de l’île fusionneront pour créer une grande ville qui portera son nom; Laval.
Il n’y a pas que les sulpiciens dont les affaires vont bien. Pour les jésuites la vie est tout aussi rose. Pierre Janson dit Lapalme leur construit une église dans l’île de Montréal. On en profite afin de prolonger la palissade, qui protège la ville, vers l’est afin d’y intégrer le fortin du coteau, près de la chapelle Notre-Dame de Bon Secours.
C’est dans ce contexte qu’est née notre ville. Malgré qu’elle fut concédée en seigneurie aux jésuites en 1636, six ans avant la fondation de Montréal, elle n’a pas connu le même développement démographique. Il n’en demeure pas moins qu’elle a beaucoup d’histoire. Il est cependant dommage que du premier village de l’île, Saint-François-de-Sales, il ne subsiste ni la première église, ni le manoir… On ignore même l’endroit du premier cimetière. Il n’y a même pas de panneau pour rappeler ce lieu extraordinaire où une poignée de courageux et vaillants colons ont défriché ce coin de terre. Et cela au péril de leur vie. Car ils étaient sujets, à tous les jours, à une éventuelle attaque des premières nations. Mais, heureusement, nos ancêtres aussi étaient des rêveurs.
Mars 2002
À LA RECHERCHE DE SES ANCÊTRES
par Mario Scott
Un procureur fiscal en 1655
Bonjour ! Je m’appelle Paul Vachon. Je suis le neuvième arrière-grand-père de Mario Scott, l’auteur de cet article. Je suis né en 1630 à Copechagnière, dans le Poitou, en France. Je suis arrivé en Nouvelle-France, plus précisément à Beauport, en 1653. En ce début de la colonie, nommé par le représentant du roi, j’occupe le poste de notaire royal et de notaire seigneurial pour les seigneuries de Notre-Dame des Anges, de la côte de Beaupré, de l’île d’Orléans, d’Argentenay et, bien entendu, de Beauport.
L’autre jour, lorsque j’observais mon descendant, Mario, entrain d’effectuer ses recherches généalogiques, j’ai bien ri lorsqu’il a découvert que j’étais procureur fiscal. Imaginez sa réaction, lui ainsi que plusieurs membres de sa famille ont travaillé au ministère du revenu. Il se demandait si ce métier était dans leurs gênes. Mais attention! Mes responsabilités, à ce titre, sont différentes des leurs.
Le procureur fiscal, en cette fin du dix-septième siècle, est un officier qui a la charge, disons, du ministère public auprès du tribunal seigneurial. Je dois veiller aux droits du seigneur et aux intérêts communs. En tant que magistrat, je suis le procureur du roi, comme dans le vieux pays, dans les justices royales. Je représente le seigneur, qui ne peut pas assister aux audiences, et j’agis en son nom, dans l’intérêt général tout comme celui des parties.
Plus particulièrement, j’entame des poursuites et je veille à l’observation et à la publication des ordonnances. Et oui des ordonnances, déjà, en 1659. Je porte plainte, j’enquête sur des dénonciations, vous connaissez cela aussi, et j’ai la supervision des officiers sous ma charge.
Au civil, je donne mon opinion dans tous les procès où je le juge nécessaire. Oh ! je ne suis pas obligé d’intervenir, mais je le fais pratiquement dans tous les cas afin de soutenir l’une ou l’autre des parties plaignantes engagées. Au criminel, mon intervention est de rigueur. J’y agis en tant que partie principale. Dans toute instruction criminelle, je prends connaissance des plaintes officielles adressées directement au juge d’instruction. Mais loin de moi l’idée de mener le procès ou d’effectuer des arrestations, même en cas de flagrant délit. Ce n’est point de mon ressort. Cependant, jamais le juge ne rend sa décision sans prendre connaissance de mon opinion dans l’affaire. Il y est obligé, à défaut de quoi, le jugement serait annulé.
Le juge doit, avant même le début du procès, entendre mon résumé de la cause. Je procède toujours de la même façon. Je prononce mon réquisitoire debout, je donne mes conclusions et, ensuite, je quitte la salle d’audience. Je laisse le juge délibérer et prononcer son jugement hors de ma présence.
J’ai aussi, en tant que procureur fiscal, la responsabilité de veiller aux intérêts des mineurs et des absents dans la seigneurie. Car, à mon époque, il m’incombe de me préoccuper de la protection de ces derniers et de leurs intérêts. Par exemple, je demande au juge de nommer un tuteur, d’apposer des scellés, d’effectuer un inventaire de biens ou une reddition de compte. Bref, ce n’est pas de tout repos, comme votre tâche je suppose. Mais je trouve valorisant d’être le représentant de la justice seigneuriale.
Et je ne suis pas le seul. Mario a deux autres arrière-grands-pères qui, comme moi, ont porté le titre de procureur fiscal ; Guillaume Renault, son huitième arrière-grand-père, né en 1643 et décédé en 1708, et Jean Gervaise, né en 1616, son neuvième arrière-grand-père. Jean était aussi un excellent maître-boulanger. Il n’était pas rare de porter deux tapabords, pardon, deux chapeaux à cette époque.
Malheureusement, j’ai dû abandonner de façon prématurée mon poste de procureur fiscal, en 1703, à cause de la petite vérole, des suites de laquelle je suis décédé, à la St-Jean-Baptiste, à Beauport.
Et pour ceux qui n’ont pas encore fait le lien. Les petits gâteaux Vachon, eh! oui… ce sont mes descendants. Mais, une chose que je ne comprends pas ; aucun de mes arrière-petits-fils ne s’est appelé Jos Louis !
Paul Vachon, procureur fiscal
(avec la collaboration de son huitième arrière-petit-fils Mario Scott, généalogiste et historien amateur)
Juin 2002
À LA RECHERCHE DE SES ANCÊTRES
Par Mario Scott
Nos ancêtres esclaves de la Nouvelle-Angleterre
Plusieurs personnes ont, dans leur arbre généalogique, des ancêtres royaux. La plupart de ces gens sont des descendants de Catherine De Baillon.
Pour ne pas être en reste, et surtout pour le plaisir et la curiosité, je tentais également de trouver un lien familial avec Catherine, mais ce fut en vain.
Quelques mois de recherches plus tard, je réussis à colorer mon arbre de sang bleu avec deux ancêtres inconnues jusqu’alors pour moi; Anne Le Neuf du Hérisson (1632-1711) et Anne Heard (1681-?).
Cette quête de noblesse m’a lié à un passé chevaleresque, certes, mais plus important encore, elle m’a fait découvrir une histoire intéressante mais oh! combien tragique pour les colons du Massachusetts. Et cette passionnante histoire c’est la nôtre, car plusieurs d’entre nous en faisons partie.
A la fin du XVIIe siècle et au début du XVIIIe siècle, plusieurs conflits nord-sud opposent les Français et les Anglais. Les miliciens de la Nouvelle-France, accompagnés d’Iroquois effectuent des raids, chez les voisins du sud, dans les villages de la Nouvelle-Angleterre. Ces attaques sont commises contre nos ennemis anglais, en représailles à leur soutien aux indiens qui sont leurs alliés et qui harcèlent constamment notre colonie. On sait aussi que les Anglais souhaitent éliminer les Français du continent, catholiques par surcroît, et étendre leurs frontières. Et comme on sait que la meilleure défense est l’attaque…
Gonflés à bloc par le souvenir des événements d’il y a un peu plus d’un an, lorsque Phipps et sa flotte tentèrent, le vendredi 6 octobre 1690, de prendre Québec, on planifia l’attaque du village de York.
C’est dans ces circonstances que notre ancêtre Anne Heard, alors âgée de 11 ans, fille de Benjamin Heard et de Elizabeth Roberts, fut enlevée par des Indiens de la tribu des Loups, le vendredi 25 janvier 1692. Anne est la petite fille de Thomas Roberts (1600-1673), gouverneur, en 1640, de Dover, qui allait devenir le New-Hampshire. Lui-même est le fils de Sir Thomas Roberts (1558-1626), baronet et seigneur de Glassenbury, dans le comté de Kent, en Angleterre.
Anne la captive est amenée dans la région de Montréal où les Loups la vendent à Pierre Prud’homme, un maître-armurier de Ville-Marie. Deux ans plus tard, comme elle est protestante, ce dernier la fait baptiser à l’église Notre-Dame, le samedi 10 avril 1694. Il l’engage ensuite comme servante. Des jours meilleurs s’annoncent pour notre ancêtre. Près de quatorze ans après son enlèvement, le lundi 19 octobre 1705, Anne épouse à Montréal, à l’âge de 24 ans, le Français d’origine angevine Sébastien Cholet dit Laviolette.
Voici quelques familles descendantes de Anne Heard : Legault, Deslauriers, Clément, Larivière, Charlebois, Groulx, Lefebvre, Demers, Lacoste, Lanctôt, Scott…
Deerfield, au Massachusetts, qui a été le sujet de plusieurs écrits, a été attaqué, pillé et brûlé à maintes reprises en 1677, 1693, 1696 et en cette terrible année de 1704. Les Américains voient Deerfield comme notre massacre de Lachine.
C’est dans ce bourg qu’a vu le jour une autre ancêtre de plusieurs québécois, Abigail Elizabeth Nims dite Touatogouach. Née le jeudi 27 mai 1700, elle est la fille de Godfrey Nims et de Mehitable Smead. On prétend que son père s’appelait en fait Geoffroi Nîmes, un français né dans la ville du même nom, émigré ensuite en Nouvelle-Angleterre. Mais rien n’est confirmé à ce sujet.
En ce début de mars 1704, Jean-Baptiste Hertel de Rouville, à la tête de 250 soldats canadiens et amérindiens, attaque et dévaste Deerfield. Une cinquantaine d’habitants est tuée et cent onze sont fait prisonniers. Une longue marche s’amorce alors à partir du Massachusetts. On longe le New-Hampshire, bifurque à l’ouest en traversant l’état de New-York, on gagne le nord pour fort St-Francis, près de Sorel, et de là on arrive, le vendredi 25 avril, à destination; Montréal. Plusieurs esclaves, dont la mère de Abigail, sont décédés en cours de route, épuisés par ce long périple, par les rigueurs du froid…
Parmi les petits prisonniers, Abigail Elizabeth Nims, âgée de 3 ans, n’est pas seule. Il y a Josiah Rising, âgé de 10 ans, avec qui elle unira sa destinée, plutôt mal commencée, quelques années plus tard, à Montréal. Josiah est né le mardi 2 février 1694, à Suffield, près de Hartford, dans le Connecticut. Il est le fils de John Rising et de Sarah Hale.
Les deux esclaves ne seront pas remis ou vendus aux colons français. Ils vivent en captivité avec les Indiens au Fort Lorette à la mission du Sault-au-Récollet. On donne le surnom de « Shoentakouani » à Josiah. Ce qui signifie à peu près ceci « on lui a enlevé son bien-être ou son village ». « Touatogouach », ou si vous préférez Abigail Elizabeth, demeure avec l’Indienne Ganastasi dans son wigwam. Elle devait exceller dans l’art de la pêche puisque son surnom signifie à peu près ceci « celle qui tire, extrait… quelque chose de l’eau ».
Le dimanche 15 juin 1704 Abigail Elizabeth Nims est baptisée sous les prénoms de Marie Élisabeth. Sa marraine est « la Damoiselle » Marie Élisabeth Le Moyne, la fille de « Messire » Charles Le Moyne, baron de Longueuil.
On baptise Josiah Rising le jeudi 23 décembre 1706 sous le prénom de Ignace et on francise son nom en Raizenne.
Au Lac des Deux-Montagnes, dans le document attestant le mariage de nos ancêtres, le lundi 29 juillet 1715, le prêtre a écrit ceci : « Ignace Shoentakouanni et Elizabeth Touatogouach, les deux anglais et qui souhaitent demeurer avec les Indiens christianisés, ne renoncent pas seulement à leur nation mais veulent vivre « en sauvages ». Ignace âgé environ de 23 ans et Elizabeth environ 15. Les deux ont été pris à Deerfield il y a environ 13 ans ».
Ancêtres, entre autres, des Raizenne, Josiah (Ignace) et Abigail Elizabeth (Marie-Élisabeth) ont eu 8 enfants; 6 filles et deux fils.
Certains d’entre eux ont eu la vocation. Marie-Madeleine Raizenne porta le nom de Soeur Saint-Herman. Elle a enseigné pendant 25 ans aux jeunes iroquoises à Deux-Montagnes. Elle termine ses jours vers l’âge de 90 ans dans un couvent de Montréal. Sa sœur Marie se fit religieuse à 16 ans. Connue sous le nom de Mère Saint-Ignace (en l’honneur de son père?) elle est devenue la 13ième supérieure de sa communauté. Elle décède à l’âge de 76 ans. On dit aussi qu’un des deux fils fut ordonné prêtre tandis que l’autre, Jean-Baptiste, qui a préféré marier Marie-Charlotte Sabourin, a hérité de la maison paternelle, à Deux-Montagnes.
L’un des petits-fils d’Ignace fut notaire et pratiqua pendant de longues années dans St-Benoit des Deux-Montagnes.
Deux enfants, Marie-Anne et Catherine, ont épousé les frères Séguin; Louis et Jean-Baptiste. Louis Séguin était le major de la milice des fortifications de la mission d’Oka. Il est inhumé dans la chapelle du roi. Trois personnes seulement ont eu cet honneur; outre lui-même, le prêtre qui a fondé la mission et son beau-père Ignace Raizenne. Fait à noter, Louis Séguin et son épouse Marie-Anne Raizenne avait 4 domestiques à leur service. Fait plutôt rare pour cette époque.
Nous pouvons être fiers de nos ancêtres esclaves, enlevés en Nouvelle-Angleterre et élevés par les Amérindiens. Souvenons-nous de leur courage dans les moments difficiles. Cette force de caractère est leur héritage. Ignace et Élisabeth ont des descendants dans plusieurs familles dont voici quelques patronymes : Castonguay, Séguin, Sabourin, Villeneuve, Chénier, Gareau, Guénette, Sauvé…
Septembre 2002
À LA RECHERCHE DE SES ANCÊTRES
par Mario Scott
EN ANGLETERRE, PENDANT PLUSIEURS SIÈCLES, ON PARLE LE FRANÇAIS
En effectuant des recherches sur Guillaume 1er (1027-1087), dit le Conquérant, mon 28ième arrière-grand-père, j’ai été étonné d’apprendre qu’à la suite de sa Conquête de l’Angleterre, et ce, pendant plusieurs siècles, la langue des Normands fut parlée dans ce pays. Pays dont la devise est « Dieu et mon Droit » et celle de leur Ordre très noble de la jarretière; « Honni soit qui mal y pense ». Et tout cela en français!
Allons voir de plus près ce phénomène intéressant.
PETIT-FILS DE ROLLON LE VIKING
Robert Ragnvaldsson Von Norwegen (860-932 env.), dit Rollon, est le troisième arrière-grand-père de Guillaume le Conquérant, premier roi d’Angleterre, qui régna de 1066 à 1087 et septième duc de Normandie, de 1035 à 1087.
Rollon, un roi Viking, était le fils d’un jarl (aristocrate) de Môre, en Norvège. Son groupe, vraisemblablement composé de Norvégiens et de Danois, a envahi la Normandie vers le IX ième siècle.
Dès cet instant, le vocabulaire normand est enrichi par la langue viking.
Des noms de cités normandes telles Elbeuf, Honfleur, Caudebec ont tous des terminaisons de mots d’origine scandinave : -beuf, -fleur, -bec.
Le suffixe « beuf » (du scandinave budh) désigne un « abri ». Ainsi le nom de la ville de Criquebeuf, sachant que Crique signifie église, veut dire « à l’abri de l’église ». La ville d’Elbeuf; « à l’abri de la fontaine », Lindebeuf; « à l’abri des tilleuls »…
Le suffixe « bec » (du scandinave bekkr) signifie « ruisseau ». Le nom de la ville de Caudebec, veut dire « le froid ruisseau », car « Caude » vient du mot « kald » qui signifie « froid ». Houlbec, elle, veut dire « le profond ruisseau ».
Finalement, le suffixe « fleur » (du scandinave flar) signifie crique. On retrouve celui-ci dans le nom des villes normandes de Honfleur ainsi que de Harfleur.
La langue française a conservé certains termes vikings. Mais aujourd’hui il ne reste que très peu de mots et quelques noms toponymiques. Il s’agit surtout de termes de navigation et de pêche : vague (de vagr), marsouin, homard (de hummarr), babord, tribord… Le scandinave a aussi influencé la langue anglaise.
LA LANGUE D’OÏL : DE L’ANCIEN FRANÇAIS
Des Normands, des Bretons, des Picards, des Flamands et des habitants de l’Ile-de-France, près de 10,000 hommes en tout, accompagnaient Guillaume le Conquérant en Angleterre.
La plupart d’entre eux étaient des chevaliers, des religieux et des commerçants. Ils avaient en commun de parler des dialectes de la langue d’oïl. C’est-à-dire une forme de l’ancien français parlé dans chacune des régions de la France, issu du latin parlé dans le nord de la Gaule. Le mot « oïl » signifie « oui » au nord de la Loire. Cependant, « oui » est prononcé « oc » au sud. Il y avait donc des dialectes différents selon la région.
Ces vainqueurs de la bataille de Hastings, en 1066, importèrent donc leur culture. Quelque temps après, leurs dialectes combinés au vocabulaire du peuple soumis, créent une langue anglo-normande qui est utilisée pendant plusieurs siècles en Angleterre. Un parler qui est un mélange de langues d’origine latine et germanique. Cette dernière ayant été introduite dans les îles britanniques par les Saxons et les Angles.
CES MOTS FRANÇAIS DANS LE VOCABULAIRE ANGLAIS
Des mots d’origine latine et germanique sont toujours existants dans la langue anglaise d’aujourd’hui. Par exemple : « challenge » (défi), « pledge » (gage, pacte), « conquer » (conquérir, de conquerre en ancien français), « riot » (émeute), de riote, en ancien français également, « constable » (fonctionnaire de police), de conestable, toujours de ancien français.
Le mot « towel » (serviette) provient du mot, en vieux français, toaille, « curtain », lui, vient de cortine, encore du vieux français. Le fameux « tartan » écossais dont le mot vient de tiretaine. Le terme « coat » (tunique) provient de cote (comme la cote de mailles des chevaliers), « beverage » vient du vieux mot français bevrage, « chair » vient de chaire (un siège à dossier, dont le mot sera par la suite d’usage ecclésiastique).
« Fame » est un mot en vieux français de cette époque. Il signifie réputation et a donc la même signification en anglais. Le mot « plenty », qui veut dire abondance, est issu d’un autre mot en vieux français plenté.
Le mot « mushroom » (champignon) vient du français mousseron.
Bref, des milliers de mots français font donc partie du vocabulaire anglais.
DE LA NORMANDIE ET DE LA PICARDIE
L’anglais a conservé des mots comme castel, candelle, carpentier ou carriage qui ont été très peu ou pas du tout modifiés pour devenir « castel (aussi castle) », « candel », « carpenter » et « carriage ». On les retrouve dans les écrits en Normandie au Moyen-Âge et ils sont encore utilisés, aujourd’hui, dans les patois normands.
En français d’aujourd’hui, pour certains de ces termes, nous avons ajouté un « h » après le « c », à ces termes de vieux français, Par exemple pour les mots chandelle, charpentier…. En fait il s’agit d’un « c » latin, prononcé « ch » suivi d’un « a ». On le retrouve également dans la traduction du mot « château » pour « castel », « chariot » pour « carriage »…
D’autres mots en vieux français, avec notre « c » latin suivi d’un « e » ou d’un « i ». Comme cherise, chisel (ciseau), chive (cive ou ciboulette), féchon (mode) ont été adaptés par les anglais en « cherry/cherries », « chives », « chisel », « fashion »… Que dire de « toast » (griller) qui, en vieux français, est toster. Le latin aussi a influencé l’anglais : picture (pictura), quiet (quietus)…
D’ORIGINE GERMANIQUE
Le « w » d’origine germanique était trop compliqué à prononcer par les locuteurs d’oïl. Ils l’ont donc remplacé par un « g ». « Warrant » est ainsi devenu garant, « wage » est gage, tandis que « warren » est devenu garenne. Même chose pour « wardrobe » qui devient garde-robe. Il en est de même de mon patronyme maternel Guénette (ou Ganet) qui vient du mot allemand « wano » (espérance, attente).
Des traductions de l’anglais au français ont aussi une particularité avec ce « W en G », qui peuvent ne pas être reliées au « w » germanique, mais intéressantes. Comme « war » pour guerre, et « William » qui se traduit par Guillaume.
L’INFLUENCE DU NORD-OUEST D’OÏL
Au XI ième siècle les Français prononcent les mots « bourgeois » et « voir » en burgeis et veeir. Dans les régions de la Bretagne, du Maine, d’Anjou et de Poitou, on prononce, encore aujourd’hui, baire pour « boire », mé pour « moi ». Alors il ne faut pas s’étonner si l’anglais a conservé ces formes anciennes de receivre pour « recevoir », conveier pour « convoyer ».
On dit aussi, dans ces régions : « J’ai pou(r) » pour « J’ai peur », « goule » pour « gueule ». La langue anglaise a conservé cette prononciation dans colour, honour, flour, precious…
Pour terminer voici encore des observations particulières de cette influence française sur la langue anglaise. On dit, en anglais, « solar » pour solaire, et non « sunar » (du mot sun – soleil). Il en est de même pour le mot « lunar » (lunaire). On ne dit pas « moonar » (du mot moon – lune).
Bibliographie : « L’invasion de l’Angleterre – Guillaume le Conquérant », Revue Historia (France), édition spéciale, numéro 59, juin 1999. Il y a un excellent article, intitulé : « La langue anglaise : des milliers de mots français! » de Catherine Bougy, maître en ancien français et dialectes de l’université de Caen.
Décembre 2002
À LA RECHERCHE DE SES ANCÊTRES
par Mario Scott
MIETTES HISTORIQUES
En ce début d’année 2003, que je vous souhaite excellente, j’ai pensé vous faire partager quelques bribes historiques. Petites découvertes effectuées lors de lectures au cours de mes recherches généalogiques. Quelques-unes sont connues, d’autres le sont moins ou pas du tout.
QUELQUES ARPENTS DE NEIGE
Voici ce qu’écrivait Voltaire, dans son roman Candide, l’année où les troupes de Montcalm tombaient sous les ruines de la nouvelle colonie :
« Vous savez que ces deux nations (la France et l’Angleterre) sont en guerre pour quelques arpents de neige vers le Canada, et qu’elles dépensent pour cette belle guerre beaucoup plus que tout le Canada ne vaut ».
C’était en 1759.
ET MADAME DE POMPADOUR
Elle dédaignait également notre nouvelle colonie. Après la prise de Québec par les Anglais elle s’exclama : « Enfin, le roi dormira tranquille! »
COMME SI CE N’ÉTAIT PAS ASSEZ
Le général français Lafayette, qui commandait des troupes américaines, apostropha quelques seigneurs canadiens qui avaient combattu ses armées : « Eh quoi!… vous vous êtes battus pour demeurer colons au lieu de devenir indépendants! Restez donc esclaves! »
LA CONQUÊTE
Lors de la signature de la cession de notre pays à l’Angeleterre, le roi Georges III adressa ce compliment à Madame de Léry, présente à la cour de Londres :
« Madame, si toutes les dames canadiennes vous ressemblent, j’ai vraiment fait une belle conquête ».
LES CHÂTIMENTS AU DÉBUT DE LA COLONIE
Le 29 décembre 1635, afin de contrer les problèmes de l’époque, Monsieur de Chateaufort avait fait installé un carcan et placardée une affiche, sur un poteau, devant l’église de Québec. L’avis faisait état des peines encourues par les gens qui blasphémaient, s’enivraient ou manquaient l’office du dimanche ou des jours de fêtes. Les coupables étaient installés sur un cheval de bois, les exposant à la population pour leur infamie et, par ces punitions exemplaires, maintenir les bonnes âmes dans la crainte et le droit chemin. Quelques jours plus tard, soit le 6 janvier 1636, un homme convaincu d’ivrognerie et de blasphème dû enfourcher le cheval… à la gueule de bois!
JACQUES CARTIER DÉCRIT UNE COUTUME D’ICI, INCONNUE EN FRANCE
« Les indiens (Cartier a écrit « sauvages ») ont une herbe dont ils font grand amas, durant l’été, pour l’hiver, laquelle ils estiment fort, et en usent, les hommes seulement, en la façon qui suit. Ils la font sécher au soleil et la portent à leur col, renfermée en une petite peau de bête, au lieu de sac, avec un cornet de pierre ou de bois. Puis, à toute heure, ils font poudre de la dite herbe et la mettent à un bout du cornet, puis ils mettent un charbon de feu dessus; et par l’autre bout ils soufflent tant, qu’ils s’emplissent le corps de fumée, tellement qu’elle leur sort par la bouche et les nasilles, comme par un tuyau de cheminée. Ils disent que cela les tient sains et chaudement, et ne vont jamais sans les dites choses. Nous avons expérimenté la dite fumée, et après l’avoir mise dans notre bouche, il semblait y avoir de la poudre de poivre, tant elle était chaude ».
LA PREMIÈRE HORLOGE EN NOUVELLE-FRANCE
Lorsque Champlain débarqua à Québec, il y a plus de trois cents ans, les autochtones étaient émerveillés par les choses qu’il apporta de France.
Mais l’objet qui les fascinaient le plus était une horloge; la première horloge de ce pays. Il était amusant de regarder le visage fasciné des chefs, des « squaws » (indiennes) et de leurs « papooses » (bébés) assis, en admiration devant l’objet, en attendant qu’elle indique l’heure d’un son. Ils disaient alors qu’ils attendaient qu’elle « parle ».
Champlain trouvait cette assiduité quelque peu encombrante et il voulait se défaire de ces gens, mais sans les brusquer, ni les offenser. Il eut alors une brillante idée. Il leur enseigna qu’à une certaine heure, c’était le temps d’aller chasser ou de préparer les repas ou, à six heures, de se retirer dans leurs « wigwams » (huttes). C’est ainsi que le fondateur de Québec, sans froisser ses alliés, se débarassa de ces encombrants visiteurs qui étaient plein d’admiration pour la chose.
L’HONNEUR DE VAUQUELIN
Le 16 mai 1760 la flotte anglaise revient à Québec. Les vaisseaux britanniques Le Vanguard et la Diane attaquent nos frégates l’Atalante et la Pomone qui, avariées et pas assez rapides, se laissent dériver sur l’eau, vers le rivage, afin de s’échouer.
La Pomone s’enlise dans le sable à L’Anse au Foulon.
L’Atalante silencieuse, commandée par Jean Vauquelin, a reçu plus de 850 boulets ennemis, selon les deux capitaines anglais. Elle brûle par l’avant et penche dangereusement. L’eau s’engouffre de partout. La frégate est devant la rive de Pointe-aux-Trembles, près de Neuville.
Lorsque les Anglais grimpent à l’abordage ils constatent que le pavillon du navire flotte encore. Ils aperçoivent Vauquelain en grand tenue et sans épée; il l’avait jetée dans le Saint-Laurent pour éviter de rendre l’arme. « Mais pourquoi n’amenez-vous pas vos couleurs?, lui demande l’officier anglais. Si j’avais eu plus de poudre, je causerais encore avec vous, Monsieur, lui répondit fièrement Vauquelin. Quant à mon drapeau, si vous voulez le prendre, vous n’avez qu’à monter le chercher…».
NOS VIEILLES ARCHIVES
Plusieurs vieux registres paroissiaux ont disparus, au grand dam des chercheurs. Mais certains furent retrouvés.
C’est ainsi qu’on trouva à Montréal, dans un commerce de bric-à-brac, un cahier de trente-huit années des registres de la paroisse du Cap-de-la-Madeleine, Le précieux document, qui couvrait la période de 1673 à 1711, était en vente.
À l’Ile-du-Pas, le père récollet qui desservait cette paroisse a employé les registres au tapissage d’une armoire. Même utilisation au Cap-de-la-Madeleine. Cependant, le vicaire affirma que les registres servirent à tapisser la sacristie.
LA CULTURE DU BLÉ DANS LA COLONIE
Selon Pierre Kalm, un naturaliste suédois qui visita le Canada en 1749, les Français trouvaient que les hivers au Canada étaient trop froids pour le blé de France, qui ne pouvait y mûrir. Ils firent alors venir du blé du Nord.
C’est ainsi que Kalm écrivit, dans le compte-rendu de son voyage, que tout le blé que cultivaient nos ancêtres était d’origine norvégienne ou suédoise.
Mais, plus de cent ans auparavant on mentionne qu’au printemps de l’été 1644 on commença à semer du blé froment à Ville-Marie, à la demande de Monsieur D’Ailleboust. On avait craint d’abord que le froid excessif du pays ne fit périr les semences. Mais on se rendit compte, au contraire, que ce blé se multipliait facilement et en abondance dans ces premières années de la colonie.
D’origine norvégienne, suédoise ou française, ou un mélange des trois, le blé canadien est, aujourd’hui, l’un des meilleurs et reconnu dans le monde.
LES BRASSERIES SOUS LE RÉGIME FRANÇAIS
Afin de diminuer les désordres occasionnés par la consommation du vin et de l’eau-de-vie, et d’éviter le gaspillage d’une surproduction du blé on fit la promotion de la fabrication de la bière. Le Conseil Supérieur ordonna, en 1668, que seuls ceux qui auraient une brasserie pourraient vendre de la bière et ce, pendant une période de dix ans, afin de compenser l’investissement du producteur. Ainsi, comme les récoltes de blé étaient abondantes on utilisait l’excédent pour créer de la bière et cela évitait une diminution de l’exploîtation de cette agriculture. On permettait cependant aux familles de brasser de la bière artisanale pour leur propre consommation.
À Montréal une brasserie existait dans le voisinage du fort avant l’arrivée de Jean Talon.
Mars 2003
À LA RECHERCHE DE SES ANCÊTRES
par Mario Scott
Anne-Marie Phansèque, fille du roi, de Hambourg à Saint-François de Sales, à Laval
Je vais vous raconter une histoire à travers laquelle vous découvrirez où peut mener une recherche généalogique et historique.
Vous verrez que dans le cadre de ces péripéties pour trouver un ancêtre, nos démarches nous mettent parfois en contact avec des collaborateurs intéssants et intéressés. Je les en remercie d’ailleurs.
MES ANCÊTRES DE SAINT-FRANÇOIS DE SALES
Mes recherches généalogiques m’ont fait découvrir que j’ai plusieurs ancêtres qui se sont installés à Saint-François de Sales, où je demeure aujourd’hui. Fait curieux, en passant, j’ai été baptisé dans la paroisse de Saint-François de Sales (Gatineau) et je porte, outre mon autre prénom, celui de François. Mais ce hasard n’a rien à voir avec mon récit.
Revenons donc à ces ancêtres de l’île Jésus qui m’ont amené à correspondre avec la ville de Laval ainsi qu’avec le Ministère de la Culture et des Communications du Québec. Comme il n’existe que peu de vestiges dans notre ville, je me questionnais au sujet des sites historiques et archéologiques de Laval et je me demandais s’il existait, dans notre ville, une politique de préservation du patrimoine. C’est ainsi que tout a commencé.
ANNE-MARIE PHANSÈQUE
Anne-Marie, une fille du roi, est native de Hambourg en Allemagne. En septembre 1673, elle est accueillie à l’âge de 16 ans à la Maison St-Gabriel, à la Pointe St-Charles. C’est la métairie de Marguerite Bourgeoys, fondatrice de la Congégation Notre-Dame. Anne-Marie est ma 8ième arrière-grand-mère par mes ancêtres Le Roux, Cardinal, ainsi que par ma grand-mère Gareau.
Emprisonnée à Ville-Marie pour prostitution, par la force des choses à mon avis, c’est d’elle dont parle l’humoriste Pierre Légaré dans l’émission « Histoire d’alcool », au réseau Historia. On lui attribue le métier de cabaretière. On joue même son personnage, dans une saynète, à la Maison St-Gabriel cet été, pour la deuxième saison consécutive.
Ses mésaventures sociales et judiciaires sont amplement relatées dans l’excellent livre « La vie libertine en Nouvelle-France » de Robert-Lionel Séguin.
Ne sachant pas écrire son nom de famille, qui devait ressembler à Van Zeigt ou Von Seck, il a été phonétiquement transformé par les autorités de l’époque, en Phansèque, Vanzaigue, Vansègue, Vannesexe, et une dizaine d’orthographes différentes. Personnage intriguant, j’ai voulu en savoir plus sur cette protégée de sœur Marguerite Bourgeoys.
LE GROUPE DE RECHERCHE SUR MONTRÉAL
Un jour, en octobre 1999, dans le cadre de mes recherches sur mon ancêtre, j’ai communiqué avec Monsieur Léon Robichaud du Groupe de Recherche sur Montréal.
Ce groupe, parraîné par le Musée canadien de l’architecture, a effectué une recherche sur le bâti de Ville-Marie depuis le XVIIième siècle. En 1693, lors de la séparation d’Anne-Marie et de Gabriel Cardinal, son mari violent, elle a reçu dans le partage des biens une propriété sur la rue Saint-Jacques, devant la Place d’Armes. On retrouve donc des informations sur sa propriété dans la base de données « Adhémar » du Groupe de Recherche. Voici l’adresse internet si cela vous intéresse : http://cca.qc.ca/adhemar/.
Après deux ou trois contacts avec Monsieur Robichaud, ce dernier me demanda si j’étais intéressé à consulter le dossier de mon ancêtre. Le cas échéant, il me mettrait en contact avec le responsable au Musée canadien d’architecture. Évidemment, emballé par l’idée, j’acquiesça et un rendez-vous fut fixé avec le bibliothécaire du Musée.
Je revins à la maison, tout fébrile, avec une soixantaine de dollars de photocopies de documents que je rangea avec l’acte d’inhumation d’Anne-Marie Vanzègue, qui m’a été donné par Monsieur Gaëtan Leroux, de Laval. En voici d’ailleurs le texte (j’ai conservé l’orthographe originale):
« Le cinquième jour de décembre de l’an mil sept-cent vingt et deux, je soussigné prestre faisant les fonctions curiales en la paroisse de St Joseph de La Rivière des prairies, ay enterré dans le cimetière de la paroisse de St Francois de Sales en l’Isle Jesus le corps d’une veille femme agée d’environ soixante et dix ans, Irlandoise de nation, dont je n’ay put sçavoir ny le nom de bapteme ny celuy de famille, sinon qu’elle etait connue dans les costes sous le nom de La bonne femme Cardinal, morte hier au soir subitement chez Kenoche La Jeunesse, sans avoir put recevoir aucun sacrement, mais après avoir demandé un prestre, dit chappellet, demandé pardon à Dieu, temoins le dit Kenoche La Jeunesse, alexis garieppy, francois Coron et autre » Jullien ptre.
Je lisais et relisais cet acte. Mon désir d’en connaître plus, attisé par la découverte des nouveaux documents, m’encouragea à étoffer mon dossier sur Anne-Marie. Une question hantait mon esprit: « Où est l’emplacement de ce premier cimetière de l’île Jésus?»
DES OSSEMENTS
Lors d’une ballade à vélo avec mon épouse, à la pointe est de l’île, à l’été 2000, je présumais de l’emplacement du cimetière.
Il devait certainement se trouver près de la croix de chemin, érigée en 1950 (en remplacement de celle de 1847), sur un terrain vacant. Celle-ci commémorait le site de l’ancienne église qui était à proximité. Nous fîmes une halte et j’alla interroger une dame, voisine du site de la croix, qui faisait l’entretien de sa pelouse. Elle me dit que le propriétaire qui lui a vendu sa maison, en excavant son terrain il y a quelques années, trouva des ossements humains (selon lui). Elle ajouta que son mari qui effectuait une promenade avec elle, près des lieux de l’excavation de la nouvelle maison, du côté est de la croix, donc de l’autre côté, trouva dans le sol ce qui semblait être une vertèbre humaine. J’étais donc convaincu que le terrain vacant, entre la maison de la dame et celle nouvellement construite, devait probablement faire partie du cimetière. La dame ajouta que ce terrain venait d’être acheté afin d’y construire prochainement une maison.
RECHERCHES ARCHÉOLOGIQUES SUR LE SITE
En début de septembre 2000 j’écris au Ministère de la culture et des communications. Je demande s’il est possible d’effectuer des fouilles afin de retrouver le cimetière de Saint-François de Sales, où sont inhumés, outre Anne-Marie, des membres des familles pionnières de Laval : Charbonneau, Dazé, Drapeau, Forget, Labelle, Quenneville, Chartrand, Beauchamp, Filiatreau…
Je reçois un courriel, le 29 septembre, de l’archéologue montréalais, Monsieur Brian Ross (il a travaillé sur la mise à jour du cimetière amérindien du musée d’archéologie de Montréal, dont je fait partie des Amis du musée, à la Pointe-à-Callière). Il m’apprend alors une bonne nouvelle. Il a visité la pointe de l’île en compagnie de Monsieur Hamel, l’agent culturel du ministère pour notre région, une semaine auparavant. Ils ont effectué un examen de surface du site où se trouve la croix en question et prit quelques mesures. J’étais ravi de cette collaboration et de la célérité de leur action.
Rien, selon eux, ne démontrait que ce fut l’emplacement du cimetière. Il aurait pu aussi bien se trouver au bout de l’île. Mais un doute persistait. C’est pourquoi ils préparaient une recherche historique préalable à une investigation archéologique. Il sollicitait mon aide afin de leur fournir de la documentation à partir de mes notes historiques et généalogiques.
L’archéologue me mentionna également qu’il eut été sage que les ossements leur fussent remis, à l’époque, afin d’en faire l’analyse et de s’assurer qu’il ne s’agissait pas d’os d’animaux.
Finalement, en réponse à ma question, il me dit qu’aucune loi ancienne n’interdisait à un évêché, un diocèse, un archevêché ou une fabrique de vendre leur cimetière ou une partie de celui-ci. Plusieurs l’ont été et les acheteurs ont construit leur maison sur ces emplacements. C’était donc courant et je l’ignorait.
Quelques jours plus tard, je fis parvenir à Monsieur Ross, tel qu’entendu, 31 pages de mes notes susceptibles d’aider le ministère dans sa recherche historique.
LES FOUILLES DE 1978
Le 20 octobre, Monsieur Ross, toujours aussi affable, m’apprend qu’une étude historique ainsi qu’une recherche archéologique ont déjà été entreprises en 1978 (ainsi qu’en 1963). Si ma mémoire est bonne, une demande en avait été faite par notre Société d’histoire et de généalogie de l’île Jésus. Le but de cette recherche, qu’il souligne importante, était de trouver des vestiges architecturaux. Ils ont d’ailleurs découvert les ruines de deux bâtiments mais aucun ossement humain. Il termine son courriel en m’apprenant que de nouvelles recherches archéologiques sont envisagées très bientôt et si possible avant l’hiver.
LE TEMPS FILE ET LES ÉVÉNEMENTS SE BOUSCULENT
Monsieur Ross m’écrit le 24 novembre. Il fait suite à mon courriel lui apprenant que le propriétaire du terrain, où il y a la croix, a débuté ses travaux de construction. Je crains que cela mette en péril le projet et, surtout, je voulais des nouvelles.
Il me dit que des discussions, au ministère, entre les bureaux de Monréal et de Laval, ont quelque peu freiné leurs démarches. Car, étant donné qu’il relève de la direction de Montréal, elle avait eu la gentillesse de « prêter » ses services à Laval. Les supérieurs acceptèrent qu’il continue d’être relié au dossier, mais il n’en avait plus la charge. La responsabilité est confiée à Madame Anne-Marie Balac, qui connaît bien le patrimoine et l’histoire de Ile Jésus.
Il me rassure en disant que les travaux déjà avancés de la maison ne mettent pas fin au projet. Une entente est même survenue entre Monsieur Hamel, de la direction de Laval, et le propriétaire des lieux qui consent, gentiment, à ce que des fouilles archéologiques soient réalisées sur le terrain avant qu’il ne soit aménagé au printemps. Madame Balac et Monsieur Hamel sont entrain d’identifier les espaces susceptibles de contenir des témoins archéologiques. Monsieur Ross termine sa correspondance en me disant qu’il me fait parvenir, tel que je lui ai demandé, des copies du dossier des fouilles de 1978.
EST-CE LA FIN DE CE BEAU PROJET?
Trois jours plus tard, soit le 27 novembre, l’archéologue Brian Ross, qui a toujours été un excellent collaborateur dans ce dossier, répond à un autre de mes courriels où je l’interroge. Il me signale que mes documents n’ont pas encore été utilisés, mais ils seront d’une grande utilité pour les historiens et les archéologues qui poursuivront les recherches cet hiver et au printemps prochain. Aujourd’hui même, Madame Balac et Monsieur Hamel iront identifier les espaces à fouiller selon la disposition de la nouvelle maison. Il m’apprend également que les travaux de 1978 devaient se poursuivrent en 1979 mais qu’ils ne le furent pas, en ignorant pour quels motifs.
Le 8 décembre 2000 Monsieur Ross m’écrit : « … Pour ce qui est de la suite des travaux, cela demeure un dossier à suivre ».
Le dossier stagne. Le 4 juin 2001 Monsieur Ross me réfère à Monsieur Hamel, car il ne peut s’occuper du dossier. Probablement hors de son contrôle.
Ce jour-là je fais parvenir un courriel à Monsieur Henri Hamel, agent culturel en région de la direction de Laval, dont le bureau est à Ste-Thérèse. Je reçois un accusé de réception de mon courriel. Et puis, plus rien! Malgré la rupture des contacts, j’aime à penser qu’un jour, peut-être, les démarches se poursuivront. Je suis déçu, certes, de cette fin abrupte, mais ce fut une expérience captivante et enrichissante. Et je tiens à remercier tous ces intervenants pour m’avoir donné l’occasion de vivre ce beau rêve. Ne faut-il pas, d’ailleurs, aller jusqu’au bout de ceux-ci? C’est ce que j’ai tenté de faire.
En septembre 2001 le journal « Ensemble », de l’Association des citoyens de Saint-François, montrait une photo de cette croix de chemin, dont j’ai parlé, jetée, à la fin du printemps précédent, sur un tas de détritus devant la nouvelle maison. En plus de ne pas trouver l’emplacement de l’église et du cimetière, on perdait ce qui commémorait la proximité de ces lieux. Heureusement que notre société veillait au grain. Grâce à elle, une nouvelle croix installée de l’autre côté de la rue, devant la chapelle Saint-Mathieu, indique encore le site.
J’ignore toujours l’endroit exact où sont inhumés mes ancêtres. Mais j’ai essayé de le trouver. Cependant, la sérénité que je ressens, lorsque je me promène dans la pointe orientale de notre île, fait en sorte que je sais qu’ils reposent tout près… et en paix!
Juin 2003
À LA RECHERCHE DE SES ANCÊTRES
par Mario Scott
QUE VALAIT LA NOUVELLE-FRANCE?
J’ai pensé m’attarder sur de petites choses, parfois irritantes, que nous rencontrons au cours de nos lectures traitant de l’époque de la Nouvelle-France, parce qu’il nous est difficile d’en saisir la valeur.
Quel monnaie d’échange utilisait-on? Combien valait-elle? Quel était le salaire des artisans? Quel était le coût d’une vache? D’une peau de loutre? Du beurre?… En sachant cela et en utilisant des points de comparaison, il devient intéressant et amusant d’analyser le pouvoir d’achat de ces nouveaux colons.
Et cela rend la lecture des textes de cette époque plus agréable et plus intéressante.
Mais tout d’abord, on parle dans l’histoire de bottes de sept lieues. Quelle est donc la distance d’une lieue? Et que vaut le pied français?
UNITÉS DE MESURE
Autrefois Aujourd’hui
Un arpent 58,5 mètres
Une lieue 4,99 kilomètres
Une perche 5,85 mètres
Une toise 1,95 mètres
Un pied français de cette époque correspond à 1,066 pied anglais, étalon que nous connaissons bien.
LA MONNAIE
Les unités monétaires de la Nouvelle-France étaient évidemment les mêmes qu’en France. Sauf au moment où on introduisit les cartes à jouer comme valeur monétaire. Les monnaies d’échange étaient alors l’obole, le denier, le sol ou le sous, la livre ou le franc, l’écu, une pièce en argent, le pistole, et le louis, une pièce en or. D’ailleurs on utilisait souvent le terme un “louis d’or”.
SA VALEUR
1 obole = ½ denier
12 deniers = 1 sol ou 1 sou
1 livre ou franc = 20 sols ou 20 sous
1 écu = 3 livres
1 pistole = 10 livres
1 louis = 20 livres
QUE PEUT-ON ACHETER?
Voici les animaux que vous pouvez acheter en 1709, et leur prix:
Un cheval; 40 livres (2 louis d’or). Une belle bête pouvait coûter jusqu’à 100 livres (donc 5 louis d’or).
Une vache; 50 livres.
Un mouton; 5 livres.
Un cochon; 15 livres (pesant en moyenne entre 150 et 200 livres).
Et les denrées que l’on peut se procurer et leur coût vers 1710:
Du beurre salée; 10 sols ou sous.
Du beurre frais; 15 sols.
Un melon d’eau; 3 à 6 sols (15 à 20 sols pour les plus gros).
Du fromage de l’île d’Orléans; 30 sols, ou sous, la douzaine (un fromage est de forme ronde, il est petit, mince et il consiste en 4 morceaux d’un poids d’une livre au total).
Un poêle coutaît 100 livres. Donc le prix de deux vaches.
LA PELLETERIE
Vous êtes un coureur des bois et vous faites le commerce de la fourrure. Voici ce que vous obtenez, en 1715, pour le fruit de vos efforts.
Peau crue d’élan; 10 livres.
Peau d’ours, de loutre et de raton; 5 livres.
Peau d’ourson; 2 ½ livres.
Peau de loup; 2 livres.
Peau de marte (martre, fouine, zibeline); 45 sols ou sous.
Peau de renard; 35 sols ou sous.
Peau de castor; 4 francs la livre (en 1663).
LE SALAIRE DES ARTISANS
Quel était le pouvoir d’achat des artisans de 1653? Voici le salaire annuel de ces gens de métier. Amusez-vous à compter ce que chacun pouvait se permettre:
Chirugien; environ 150 livres (il pouvait donc se payer un cheval,une vache, trois cochons, et trois moutons).
Menuisier; 100 livres (l’équivalent du coût de 2 vaches).
Charpentier; 75 à 100 livres.
Armurier et ouvrier; 100 livres (il cumule les deux métiers).
Armurier et serrurier; 80 livres (il fait les deux métiers).
Serrurier; 75 livres.
Armurier et défricheur; 75 livres (deux métiers).
Maçon; 80 livres.
Cordonnier; 60 livres.
Tailleur d’habits; 60 livres.
L’ENFANT PAUVRE DES MÉTIERS
On constate que la rémunération des métiers de la construction; ouvrier, maçon et serrurier, indispensables à la colonisation, est supérieure à celle du métier des armes. D’ailleurs la différence entre le salaire d’un serrurier (75 livres) et d’un armurier-serrurier (80 livres) n’est que de cinq livres. Ce qui nous laisse présumer que la différence représente le salaire approximatif de l’armurier, beaucoup moins en demande malgré la menace iroquoise, que les deux autres artisans.
On aurait pu penser le contraire puisque l’ordonnance du 14 novembre 1654, du gouverneur Lauzon, oblige tous les Français à porter “continuellement sur soy armes poudre et plomb pour tirer six coups, a peine de l’amende”.
Mais l’armurerie connaîtra son essor en Nouvelle-France qu’environ un siècle plus tard. Car, pour le moment, on ne fabrique pas les armes ici; elles proviennent de la mère-patrie.
Et parlant de prix, puisque c’est de cela qu’il s’agit dans cette chronique, les plus démunis acquièrent leurs armes et munitions à prix raisonnable chez le marchand. De plus, ce dernier se voit obligé par la loi d’accepter le paiement, faute d’argent, en blé et en pois en échange des fusils.
Jean de Noyon, mon 9ième arrière-grand-père, était maître-arquebusier, armurier-serrurier, et maître-taillandier. Mon 9ième arrière-grand-oncle Pierre Gadois était armurier-arquebusier. Antoine Destroismaison, mon 10ième arrière-grand-oncle, était maître-forgeur d’arquebuses. Ces artisans qui souvent, comme nous l’avons vu, pratiquaient d’autres métiers que celui d’armurier, afin de pouvoir subvenir aux besoins de leur famille, sont peut-être également vos ancêtres.
Septembre 2003
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